Hier soir, lors d’une soirée footballistique, une de mes copines – pourtant amatrice de bon son – m’a dit « je n’ai jamais écouté la B.O de Ma 6-T va crack-er ». Je suis tombée des nues. Oui, vraiment. J’ai même pas trouvé de vanne, c’est dire.
Si, comme elle, vous vivez dans un monde parallèle tel l’enfant bulle, voici le pitch du film.
Avant de faire « Mesrine », Jean-François Richet a eu un raté cinématographique, en 1997 : « Ma 6-T va crack-er ». On est dans une « cité sensible de Meaux », poudrière si il en est, qui va partir en couilles à base d’émeutes. Wow, le pitch de l’horreur.
On est dans la période des films de tess, et clairement le film se veut dans la lignée de « La Haine ». Mais la formule est mauvaise, le film ne marquera jamais les esprits comme celui de Kassovitz.
Remarquez, si vous voulez vous infliger ça, vous pouvez, ne serait-ce que pour l’unique rôle féminin, une nana qui dit 6 fois d’affilée « J’m’en bats la race ». Poétique, glamour, féminin. Du grand cinoche.
En marge du film, sort la B.O, pur produit des figures de proue du rap français de l’époque. Un album de 15 tracks qui s’ouvre avec un morceau de KRS-One. On est en 1997, rappelons-le. On a pas Internet, ce genre d’apparition sur un album, c’est du génie.
(J’ai perdu le livret, avec les années. Quoiqu’il est peut-être chez mes parents. Peut-être. Peut-être pas.)
Et le tracklisting, c’est ça :
J’vais pas vous faire un track by track, ça n’a aucun intérêt. Mais le fait est que sur cet album, chacun s’est surpassé, le tout sur des prods de White and Spirit. Passi et Stomy, séparément, sur 2 morceaux différents, lâchent des classiques.
D’un côté, « Les flammes du mal » de Passi est le single de la B.O et PASSE EN RADIO ! Toute la France, même celle d’en haut, chante « Foutre le dawa, niquer la halla ». De mon côté, j’ai 15 ans et mes parents voient que les soucis arrivent à pas de loup.
De l’autre, Stomy, sur « Avoir le pouvoir » nous rejoue un Scarface des temps modernes avec un refrain hyper efficace « La vie est une salope autant être son maquereau », avec une fin de track au son d’un électrocardiogramme. Et cette superbe phrase : « Il est pas mort, il est là, en train de penser entre le Paradis et l’Enfer où il y’a le plus de raclis ». Une gifle musicale, même pour les détracteurs du bonhomme (rares puisqu’on est en pleine ère du Minister A.M.E.R.).
Au milieu de ces titres, 2 gros classiques du rap français : « La Sédition » et « Retour aux pyramides ». Respectivement de 2Bal Nigget & Mystik et des X-Men.
Est-il nécessaire de détailler ces morceaux ? Really ?
Les X-Men ont le vent en poupe. On est l’année suivant la sortie de « Pendez-les » et « J’attaque du mike ». Juste après l’explosion Time Bomb et Hostile Hip-Hop.
Avec Oxmo et Lunatic, c’est les mecs à suivre de très très près. Je ne sais pas vraiment quoi dire ce morceau… Probablement un des meilleurs morceaux du rap français… Un classic parmi les classics. Ill et Cassidy, comme à leur habitude, privilégient la technicité lyricale sur une prod épurée. Punchlines, name-dropping et allitérations, tout y est. Le groupe de Ménilmontant signe très certainement le meilleur morceau de l’album.
Un morceau vaut mieux que mille mots, voyez plutôt.
Enfin, et cela n’engage que moi les gars, j’ai un amour particulier pour « Savoir dire non » de K-Reen et Shurink’N qui aborde, comme le fait souvent K-Reen à l’époque, la rupture amoureuse. Et de manière générale du maquage des meufs par leurs mecs. Avec cette punchline qui parlera VRAIMENT aux meufs « j’ai pris des gants pour tout et pour chaque dilemme ».
Cet article n’a aucunement pour but de donner une leçon de rap français, je partage juste avec vous un des albums les plus marquants de ma vie. Et en ce jour de la fête des morts, il est bon de rappeler qu’un album de cette qualité ne verra plus jamais le jour.