Si j’avais pas été vénale, j’aurais été sociologue.
Nan, je blague, j’aurais pas supporté la Fac avec les gauchards à la Beigbeder ou à la Bedos (Nicolas, pas Guy).
Bref, le regard des autres, et la réaction face au regard des autres me fascine. Alors, je teste les gens. Et je me teste aussi, de fait.
Je ne suis pas une folle de mode. En général, je mets sur mon cul ce qui me tombe sous la main. (Cette expérience est réalisée par une professionnelle. Ne pas le faire sans surveillance). Des fois, ça marche. Des fois, j’ai un look improbable et ça me fait ricaner. Ouais, je ricane. Alors, on se doute bien que les bloggueuses mode sont un mystère pour moi. Aussi abstrait que le point G, mais c’est un autre débat.
Car, dans l’attitude des bloggeuses, tout est calculé. Le style, un mélange bobo-néo-classico-contemporain-pute. La meuf, elle a pas un cheveu qui dépasse, son petit doigt est toujours bien placé, parallèle à sa ceinture, l’ongle est manucuré et match avec sa tenue, même si elle se change 8 fois/jour, le make-up est nude mais sex. Bref, c’est un androïde la gonzesse.
On espère, secrètement, qu’elle a un QI de poisson rouge, en guise de compensation.
Toi, quand tu sors, tu pries Krishna (ou Satan, selon ton appartenance religieuse) qu’il n’y ai ni vent, ni pluie, sinon ta coupe est foutue. Tu sais très bien que ta manucure va s’écailler si tu tournes le tourniquet du métro trop vite, ou trop fort. Et ton sang se glace dans tes veines à chaque chaloupe mal assurée sur tes talons de 12. Parce que, avouons-le, on a la démarche de Bambi, avec ces sublimes chaussures open-toes.
J’ai donc testé pour vous… (roulement de tambour – enfin pas vraiment parce que c’est dans le titre -) sortir habillée comme une bloggeuse mode.
J’étais donc là, vachement fière de mon idée, devant mon armoire en y extrayant les vêtements les plus bobo-néo-classico-contemporain-pute.
J’ai pas trouvé. Alors j’ai juste sorti les fringues les plus putes. J’y étais presque, avouez.
Je déniche un short en cuir bleu électrique.
Là, il s’agit de parler de ce truc, acheté alors que je devais être sous LSD. Je vois que ça comme explication plausible. Il est à la fois bleu ET en cuir. Nan mais, WTF, meuf ? Evidemment, je ne l’ai jamais porté.
Je décide de l’assortir à une paire de bottes sous le genou, d’un marcel noir et d’un sweet gris, empiécé aux coudes. Pour contre-balancer le coté pute, t’as vu.
Et je sors. Téméraire la gonzesse, je sais. Je tiens à préciser que je ne vis PAS dans le Bronx, que je connais tout mon quartier. Globalement, on m’emmerde pas.
20h, j’attends le bus. J’aurais aussi bien pu faire le tapin, j’aurais eu moins de clients qui s’arrêtent.
Après une vingtaine de minutes et autant de « hey Mademoiselle, t’as un 06 ou c’est comment ? »
D’ailleurs, si je répond « c’est comment », que se passe-t-il ? Faudra que j’essaie, à l’occaz…
Je reprends. Après une vingtaine de minutes et autant de « hey Mademoiselle, t’as un 06 ou c’est comment ? », j’arrive au bar où j’avais RDV avec mes potes.
Silence de mort. J’aime à croire que c’est parce que je suis vachement belle.
– Meuf, le te-shor bleu, c’est pas un peu… audacieux ?
– T’as rien compris, suis une bloggeuse mode.
– T’es pas plutôt une bloggueuse porno, là ?
– Tu comprends rien à la mode. Rien de rien.
J’allais quand même pas sortir en poncho péruvien.
En revanche, aucun de mes potes ne pipent mot (enfin, si, ils aimeraient bien, pour la pipe). Ils me dévorent des yeux comme si j’étais un paquet de Daphnie jeté dans un bocal à poissons rouges.
Mon pote Steph est le 1er a retrouver la parole.
– T’es vachement… bonne !
– Bah, j’me suis pas acheté un corps dans la nuit mec.
– Nan, mais on savait pas.
Si, on savait.
Toute la soirée mes potes m’ont tournés autour comme si j’étais la Princesse de Galles. Ou la catin de Babylone, question de point de vue.
Le lendemain, je suis revenue dans mon 501 et en Jordan. Et comme des poissons rouges (c’est donc le fil rouge de cette anecdote), ils avaient tout oublié et ne m’ont porté aucune considération.
Comme une fable de La Fontaine, cette histoire a une morale : Elles ont raison, ces putes de bloggueuses, elles doivent choper un max.